Fracture numérique

De Wiki livre Netizenship
Révision datée du 12 février 2013 à 20:22 par Move (discussion | contributions) (Fracture géopolitique)

inégalités, équité, inéquité, minorités, information, droits, exclusion, défavorisé



Fracture numérique

On a baptisé fracture numérique l'inégalité d'accès aux nouvelles technologies de l'information, telles qu'Internet. Ceux qui sont du bon côté de ce fossé peuvent en principe disposer du Net pour défendre leurs droits et leurs idées, pour s'informer et pour communiquer. Les autres subissent un désavantage supplémentaire à ceux qu'ils connaissaient déjà : ils se retrouvent totalement exclus d'une nouvelle dimension de la société, qui leur échappe chaque jour un peu plus.

Dans l'esprit de certains, nombreux, la fracture numérique se résume à l'accès à Internet inégal entre des régions du Monde : ceux du Nord sont pour la plupart bien connectés alors que le Sud serait en dehors du Réseau.

Cependant, cette fracture prend plusieurs formes, qui dépassent largement les clivages géo-économiques. Les fracture est surtout sociale et elle crée des sociétés à plusieurs vitesses. Une forme d'exclusion perdure, se crée ou se renforce.

Cet article recense cinq forme de fracture :

  • Economique
  • Géopolitique
  • Culturelle
  • Éducative
  • Générationnelle

Fracture économique

La fracture la plus évidente est économique. On la retrouve à une échelle globale qui montre des disparités gigantesques de connexion entre les pays : en 1996, il y avait autant de lignes téléphoniques sur l'île de Manhattan que sur tout le continent africain.[1]

Mais une telle disparité existe aussi au niveau local : même un pays très bien équipé compte des citoyens privés d'accès au réseau pour des raisons économiques. Exemple local venant de Cartitas Suisse : un migrant a accès à moins d'informations et donc a plus de mal à s'insérer.


Encadré

Ne pas envoyer ordinateurs en Afrique + Rolls/dernière main

En synthèse, deux histoires pour illustrer cette fracture:

1. Quand on pense fossé entre info-riches et info-pauvres, on pense tout de suite aux pauvres africains qui n'ont pas d'ordinateur. L'idée de donner une 2e vie à un ordinateur, en le donnant à une organisation caritative, est bien entendu une bonne intention. Elle se heurte néanmoins à plusieurs réalités qui la rendent contreproductive.

Principalement, en Afrique, les ordinateurs finissent très vite dans des décharges, et il n'y a pas d'infrastructures pour le recyclage. Donc on pollue en croyant bien faire. En plus, il y a les intermédiaires, qui se servent au passage, souvent avant même le départ, ou aux douanes. Enfin, même si on donne un ordinateur à un occidental pour un usage en occident, par exemple une banque dui fait une donation à une ONG caritative pour aider les chomeurs ou migrants de sa région, le problème peut rester complet : les bénéficiaires doivent payer des professionnels pour identifier les pannes matérielles, reconfigurer, assurer une maintenance, ce s'avère bien plus chère si c'est un ordinateur à la fois que si c'est un groupe d'ordinateurs tous pareils, ce qui faisait faire de sacrées économies d'échelles aux donateur. Sans parler de l'énergie grise, cette énergie consommée qui est difficile à calculer : transport, grosse consommation électrique de vieux ordinateurs avec des processeurs qui surchauffent...

Rolls ou poubelle ? Dès les années 1990, en Afrique, il y a avait deux tendances extrêmes pour répondre à cette question de fracture numérique. La première consistait à dire : puisqu'en occident on a commencé par voir des ordinateurs dans le bureau du directeur, sans jamais pouvoir le toucher, et que seulement petit à petit M. et Mme tout-le-monde ont commencé à avoir leur machine perso, on devrait faire la même chose en Afrique. En pensant ainsi, certains programmes d'éducation à l'informatique commencaient par mettre des ordinateurs tout cassé, hors d'état de marche, au fond des cases dans la brousse. Pour que les familles s'habitudent, commencent, comme nous, avant de leur donner un viel ordi, puis professivement leur distribuer du matériel de meilleure qualité. Mais d'autres avaient une position à l'autre extrême, ils disaient aux gentils blancs qui venaient les aider avec leurs programmes humanitaires : vous croyez qu'on est votre poubelle ? Nous on veut être respecté, alors si vous voulez nous apporter des ordinateurs, on veut des ordi derniers cris, des rolls royces.

Ces deux tendances extrêmes sont bien sûr des exemples rares, mais qui donnent un avant-goût de l'éventail d'initiatives développés pour la réduction des fractures numériques

Fracture géopolitique

Le seul facteur économique n'explique pas une mauvaise connexion à Internet pour certains pays ou régions : certaines administrations restreignent délibérément l'accès à Internet pour juguler la liberté de leurs propres citoyens à s'informer et à s'exprimer. Cas de la Chine qui surveille et limite l'accès à Internet de ses citoyens[2]. De même en Corée du Nord, l'accès à Internet est soumis à autorisation spéciale et principalement pour des buts gouvernementaux.[3]

Mais c'est aussi une fracture basée sur les rapports de force entre gouvernements, qui représentent tous les citoyens, et grands groupes de telecom, qui représentent leurs actionnaires. L'exemple peu documenté mais pourtant essentiel, c'est la téléphonie. Le GSM, technologie mondialement utiulisée pour les téléphones mobiles, repose sur la vente de licences d'exploitations de canaux d'ondes, par les gouvernements. Ces canaux sont autant d'oligopoles pour les telecom. On commence maintenant à comprendre qu'avec une connexion Internet, on peut aussi téléphoner. Cela réduit les marges bénéficiaires des telecom, et par la même cela réduit les fractures.

Fracture culturelle

Décideurs Les organes de décision de diverses collectivités craignent qu'Internet ne soit un vecteur de subversion auprès des populations dont ils ont la responsabilité. Ex. en 2012, une municipalités indienne interdit l'usage des smartphones aux femmes[4].

Hiérarchie Dans tous types d'organisations, les hiérarchies se sentent menacées dans leur autorité par l'omniprésence des médias numériques. On observe alors des réactions de rejet des ressources informatives disponibles sur Internet. Un exemple : dans un grand nombre de cursus académiques, Wikipedia est banni a-priori comme source valide de références bibliographiques, ce qui traduit dans doute une grande méfiance vis-àvis de la sagesse des foules ou une peur du vandalisme de ces outils Wikis ouverts.

De manière similaire, des pratiques déviantes mais marginales débouchent sur des décisions radicales à l'échelle de toute l'organisation. Des cas se produisent régulièrement dans des établissements scolaires, dans des cas de diffamation sur les réseaux sociaux ou des situations de cybertintimidation. Il en résulte un sentiment d'injustice pour ceux qui respectent les règles et se trouvent lésés. Cela débouche parfois sur une recrudescence d'actions de digression de ces règles perçue comme illégitimes[5].


Entreprise Le monde de l'entreprise est également sujet à des réactions de rejet, notamment vis-à-vis des plates-formes de réseautage social, perçues comme une perte de productivité plus qu'un potentiel stratégique. Ces blocages sont généralement liés à l'angoisse que suscitent les transitions en cours, où la régulation du monde du travail doit passer d'un contrôle de la présence des collaborateurs à une orientation résultats. Ainsi, les employés sont plus libres des moyens à mettre en oeuvre pour atteindre leurs objectifs, puisqu'on attend d'eux des résultats à l'aune desquels ils sont évalués. En entreprise, la hiérarchie repose fréquemment sur un statut lié à un cursus académique, un titre ou l'appartenance à certains cercles. La culture Internet bouscule cela en mettant en avance les compétences, étayées par des preuves et des résultats. De telles hiérarchies sont alors beaucoup plus relatives et fluctuantes. Cette manière de penser a encore du mal à être mise en application dans les organismes où les tenants du pouvoir craignent de tomber de leur piédestal.

réduction performance car mal formés (étude Europe du Nord).

  • CFF fait un permis de réseaux sociaux pour devenir ambassadeurs de l'entreprise. Autres cas : personnes n'ont pas culture internet nécessaire.


Journaliste qui dit "Je" suis celui qui sait produire de l'info donc le blogueur.

Ex. : Pr JP Trabichet, lorsqu'on lui dde "Dois-je interdire FB à mes collaborateurs/étudiants ?" indique "Est-ce que vous interdisez à ces personnes de discuter avec leurs amis ?". Exemple à la fin : Publier tôt, mettre à jour souvent (et indiquer niveau maturité)

Fracture éducative

Au delà des moyens techniques, politiques ou économiques qui éloignent certaines populations de la révolution numérique, une éducation inappropriée condamne beaucoup d'internautes à une intégration restreinte à l'écosystème informationnel du réseau.

Les utilisateurs voient souvent l'utilisation de l'outil informatique comme un obstacle technique, et peu sont ceux qui leur donneront un avis divergent. Il n'est donc pas rare d'entendre "J'ai fait un cours Word donc je suis à l'aise avec l'informatique". Ceci démontre le déficit d'une vision largement répandue d'internet en tant qu'écosystème avec non seulement ses outils, mais surtout ses codes, ses acteurs... qui forment un tout en perpétuelle évolution mais fondé sur des règles qui évoluent à un rythme largement moins soutenu.

Ainsi, même pour des internautes du quotidien, une large frange se cantonne à des usages de consommation proche d'un média tel que le téléphone, la poste, la radio ou la télévision : il ne produisent pas, n'interagissent pas avec des communautés, utilisent la messagerie électronique pour échanger des fichiers volumineux...

Même parmi les communautés de spécialistes de l'outil informatique, de nombreux individus ont des comportements inadaptés. Par exemple, certains concepteurs web vendent à leurs clients des sites qui limitent, voire empêchent l'analyse du site par les moteurs de recherche, fréquemment via l'usage de la technologie Flash de l'éditeur Macromedia. Un site entièrement géré par cette technologie n'est pas, à proprement parler, un site web car la notion de pages n'existe plus : on est dans une application. Par exemple, il peut devenir impossible d'indiquer l'emplacement d'une ressource interne au travers d'un simple lien hypertexte. Il faut alors indiquer à ses correspondants le chemin à parcourir dans l'application pour aboutir à ladite ressource : rendez-vous sur la page d'accueil, puis cliquer sur tel lien, ensuite sur tel autre, enfin entrez tels mots dans le formulaire et validez. Non seulement, c'est fastidieux, mais cela va à l'encontre des principes fondateurs d'accessibilité des ressource publiées.

Fracture générationnelle

natifs et migrants




Fracture numérique

M&R.png


Internet : nouvelle source d’inégalités ?

1623193681.jpg

Sept cents millions de Chinois, et moi et moi et moi... J'y pense et puis j'oublie, c'est la vie c'est la vie. Les Chinois que chantait Jacques Dutronc, dans les années 1960, paraissaient bien loin et très inaccessibles à ses admirateurs francophones. Avec le développement d'Internet, les distances se sont réduites, de manière rapide et considérable. À leurs débuts, l'ordinateur et Internet étaient perçus comme des gadgets réservés à une minorité d'utilisateurs. Ils ont, depuis lors, démontré leur caractère essentiel à la vie sociale et économique de chacun d'entre nous, partout dans le monde. La libre circulation d'une information le plus souvent gratuite concourt à favoriser l'égalité des chances et le rapprochement des individus : en proposant des outils qui facilitent la vie de tous les jours, la technologie numérique aide à réduire les différences sociales entre ses utilisateurs. Le paradoxe, c'est qu'Internet a également contribué à creuser l'écart entre utilisateurs et non utilisateurs du Net, amplifiant ainsi les inégalités qui lui préexistaient.

Web03.gif


Petite histoire d'une révolution…

Dans de nombreuses régions du monde, les commerçants des métropoles régionales s'entendent sur l'achat des récoltes paysannes. Ils se partagent les régions, créant de la sorte des situations de monopole. Lorsque l'un d'entre eux arrive dans un village avec le camion destiné à charger la récolte locale, il se trouve, face aux paysans, en situation de force : « Vous n'avez pas le choix. C'est moi qui décide du prix, car je suis le seul à venir dans votre village éloigné pour acheter votre récolte. » Ce prix, le sien, finit en général par être accepté.

Mais avec l'arrivée des téléphones mobiles et d'Internet, les paysans équipés ont désormais la possibilité de répondre : « Nous sommes navrés, cher négociant, mais nous venons de nous renseigner sur le Web ou par téléphone. Il en ressort que si nous allions vendre notre récolte en ville par nous-mêmes, nous en obtiendrons un prix supérieur. Alors si vous n'acceptez pas notre prix de vente, nous louerons un camion et irons vendre notre récolte en ville. Vous ne tenez plus le couteau par le manche. C'est maintenant nous qui décidons. »

Et de ses laissés pour compte

Cette petite histoire illustre comment les plus défavorisés sont privés des ressources auxquelles ils pourraient avoir droit, s'ils disposaient d'une connexion à Internet.

Les victimes de la fracture numérique sont nombreuses, notamment :

  • Les plus pauvres, qui n'ont pas les moyens de se procurer des appareils informatiques ou d'en louer ;
  • Les plus éloignés des centres villes, qui n'ont accès ni au réseau, ni aux cybercafés, et dont personne dans l'entourage ne peut encourager l'usage d'Internet ;
  • Les plus âgés, qui n'ont pas encore réussi à s'adapter à ce nouveau fonctionnement social.

Sur Terre, en ce début du xxie siècle, 2,6 milliards d'humains vivent avec moins de deux dollars par jour. Ils sont tout en bas de l'échelle sociale. Et, tout en haut, un cinquième de la population mondiale consomme à lui seul environ 90 % des ressources disponibles. Ces chiffres ont été publiés dans un état des lieux des Nations Unies en 2010.

Le manque de moyens empêche à une grande partie de la population mondiale d'accéder aux équipements numériques. Les plus pauvres, déjà handicapés par leur faible niveau de vie et le pouvoir qu'acquièrent dès lors sur eux les plus riches, sont les premières victimes de cette nouvelle iniquité : ils sont confrontés à une rareté de l'information. Parce que les nouvelles technologies permettent d'augmentater la qualité et la quantité des communications, les « bien connectés » sont plus autonomes dans leurs actions quotidiennes. Prenons l'exemple d'un train qui déraille dans une région bien connectée : très rapidement, des transports alternatifs vont être mis en place. Dans une région mal connectée, l'attente va se prolonger, les solutions s'organiseront plus lentement, car l'information circule mal. Plusieurs événements récents ont montré que l'accès à Internet pouvait amener les populations à prendre conscience de leur position et à s'autonomiser : ce fut le cas, on le sait, dans le monde arabe en 2010 et 2011, où les premières révolutions se sont organisées à partir d'Internet et des réseaux sociaux.

L'isolement géographique est un autre facteur de fracture numérique : l'accès à un lieu connecté est plus aisé en ville, directement dans un cybercafé ou avec l'aide d'utilisateurs déjà équipés. En milieu urbain, même sans ordinateur, il est possible de recueillir l'information, tant elle circule : conversations, commerces diffusant radio ou télévision… L'information est partout dans l'air. A contrario, dans un petit village de montagne, qui plus est peu peuplé où personne n'a accès à Internet, les chances de recueillir l'information de manière indirecte sont inexistantes : pas de cybercafés, ni de lieux de rencontre ou de cours d'informatique. Les liens avec l'extérieur sont trop limités pour que l'information pénètre le village. Sans Internet, ni téléphone, l'information reste en ville… sans même que les villageois se rendent compte de leur préjudice.

Par ailleurs, dans toutes les sociétés, sans distinction de classe sociale ou de localisation, les personnes les plus âgées sont plus sujettes à l'exclusion numérique. La plupart d'entre elles ne parviennent pas à intégrer à leur quotidien cette nouvelle dimension de la société, ce qui aggrave encore le fossé entre les générations. Plusieurs programmes ont été mis en place pour aider les « anciens », qui ne sont pas nés avec le numérique, à intégrer les nouveaux schémas de pensées nécessaires à la compréhension et à l'utilisation du numérique au quotidien.

La fracture numérique ne sort pas de nulle part : elle est une amplification des fractures sociales. Être exclu du numérique (ne pas avoir accès à Internet, ne pas posséder de téléphone portable, etc.) entraîne des conséquences, sociales et politiques dont nul n'avait idée au lancement d'Internet.

Inclure plutôt qu'exclure

Fracture num rique.png Pour lutter contre la fracture numérique, il existe plusieurs solutions, baptisées eInclusion, inclusion socio-digitale, insertion socio-numérique. Dans un premier temps, les initiatives en question visaient les personnes qui n'ont pas accès à l'information pour une raison économique, démographique ou géographique. Progressivement, les actions d'inclusion numérique tendent à cibler également les personnes porteuses de handicaps physiques et les seniors.


Sources et notes

http://fr.wikipedia.org/wiki/Fracture_num%C3%A9rique#Probl.C3.A9matiques

Rapport sur la fracture numérique en Suisse, par la CEAT (MM Vodoz, Steiner, etc) : http://www2.unil.ch/cwp/rap_int_pnr51.pdf

http://www.ladocumentationfrancaise.fr/dossiers/internet-monde/fracture-numerique.shtml

3 stages of digital divide

Sources iconographiques

  1. Tiré de Leland Initiative: Africa Global Information Infrastructure Gateway Project : http://pdf.usaid.gov/pdf_docs/PNABZ059.pdf
  2. Internet censorship in the People's Republic of China http://en.wikipedia.org/wiki/Internet_censorship_in_the_People%27s_Republic_of_China
  3. Wikipedia : Internet in North Korea http://en.wikipedia.org/wiki/Internet_in_North_Korea
  4. Women Banned from Using Mobile Phones in Indian Villages http://globalvoicesonline.org/2012/12/08/women-banned-from-using-mobile-phones-in-indian-villages/
  5. Anne Collier : parle de "go underground". http://www.parentsprotect.co.uk/files/a_parents_guide_to_facebook.pdf