Pirater ou se libérer? : Différence entre versions

De Wiki livre Netizenship
(RiP : Le manifeste du remixeur)
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''hackers, pirates, propriété intellectuelle, lois''
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Copier est-ce vraiment voler? C'est LA question qui fâche.
 
Copier est-ce vraiment voler? C'est LA question qui fâche.
  
Comparer un copieur illégal de série télé à un braqueur de banque ou à un violeur semble pour le moins excessif. C'est pourtant ce qui se fait couramment. Et c'est la source de bien des problèmes.  
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Comparer un copieur illégal de série télé à un braqueur de banque ou à un violeur semble pour le moins excessif. C'est pourtant ce qui se fait couramment.
  
De nouvelles lois ou projets de lois – DADvSI, HADOPI et LOPPSI 2 en France – fleurissent ça et là, qui entendent déclarer les copieurs hors-la-loi en les plaçant dans le même panier que les pédophiles et les terroristes. Conçues, promues et votées par des personnes qui ne comprennent pas les propriétés sociotechniques du numérique, ces lois se révèlent contre-productives, liberticides et inapplicables à large échelle. La seule volonté de dénoncer et de condamner les '''pirates''', pour qui ne dispose pas des moyens de saisir la situation dans son intégralité et sa complexité, est source d'échec donc de frustration, de confusion et d'enlisement collectif.  
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De nouvelles lois ou projets de lois – DADvSI, HADOPI et LOPPSI 2 en France – fleurissent ça et là, qui entendent déclarer les copieurs hors-la-loi. Conçues, promues et votées par des personnes qui n'ont pas saisi l'impact profond et irréversible des propriétés sociotechniques du numérique, ces lois se révèlent contre-productives, liberticides et inapplicables à large échelle. La seule volonté de dénoncer et de condamner les pirates est source d'échec, de confusion et d'enlisement collectif.  
  
Il est rare que la presse contribue de façon constructive au débat. Bousculée par l'arrivée du numérique, par la compression des personnels de rédaction, par les fusions qui concentrent le pouvoir dans les mains de quelques magnats et mise sous pression par l'industrie du divertissement, souvent copropriétaires ou gros annonceurs des médias importants, la presse peine à conserver son indépendance d'esprit. Il lui est difficile, dans de telles conditions, d'assurer une juste pesée des événements. La requalification du moindre copieur en « '''pirate '''», le détournement du sens du mot « '''hacker''' », le mélange indifférencié dans la même rubrique d'affaires de copyright, de pédophilie ou de vol de carte bancaire contribuent à jeter le discrédit sur la corporation journalistique. Mieux vaudrait aborder de front et en profondeur un enjeu aussi fondamental que l'évolution du système du droit d'auteur.  
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Il est rare que la presse contribue de façon constructive au débat. Bousculée par l'arrivée du numérique, par la compression des personnels de rédaction, par les fusions qui concentrent le pouvoir dans les mains de quelques magnats et mise sous pression par l'industrie du divertissement, souvent copropriétaires ou gros annonceurs des médias importants, la presse peine à conserver son indépendance d'esprit. Il lui est difficile, dans de telles conditions, d'assurer une juste pesée des événements. La requalification du moindre copieur en « pirate », le détournement du sens du mot « hacker », le mélange indifférencié dans la même rubrique d'affaires de copyright, de pédophilie ou de vol de carte bancaire contribuent à jeter le discrédit sur la corporation journalistique. Mieux vaudrait aborder de front et en profondeur un enjeu aussi fondamental que l'évolution du système du droit d'auteur.  
  
À la décharge de ceux qui stigmatisent les '''pirates''', il faut reconnaître qu'une minorité de ces informaticiens astucieux cumule les intentions. Elle appartient alors, de fait, à plusieurs « familles », ce qui brouille parfois les cartes. Souvent bienveillants, souvent copieurs, ils sont parfois attirés par le petit coup de pub que leur vaudra une manipulation moins propre que les autres. De tels abus, on l'a dit, procèdent toutefois souvent d'une blessure initiale, dont l'origine n'est autre que... le manque de reconnaissance d'une bonne action : il suffit de lire le Manifeste du '''hacker''' pour mesurer l'éthique très saine qui anime cette population et le sentiment d'exclusion qu'elle semble vivre dès l'enfance.  
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À la décharge de ceux qui stigmatisent les pirates, il faut reconnaître qu'une minorité de ces informaticiens astucieux cumule les intentions. Elle appartient alors, de fait, à plusieurs « familles », ce qui brouille parfois les cartes. Souvent bienveillants, souvent copieurs, ils sont parfois attirés par le petit coup de pub que leur vaudra une manipulation moins propre que les autres. De tels abus, on l'a dit, procèdent toutefois souvent d'une blessure initiale, dont l'origine n'est autre que... le manque de reconnaissance d'une bonne action : il suffit de lire le Manifeste du '''hacker''' pour mesurer l'éthique très saine qui anime cette population et le sentiment d'exclusion qu'elle semble vivre dès l'enfance.  
  
 
Tenter de distinguer la minorité de '''crackers''' dangereux de tous les autres utilisateurs astucieux d'ordinateurs est un acte citoyen de grande valeur. C'est un grand pas vers la réconciliation sociale et la compréhension interculturelle.  
 
Tenter de distinguer la minorité de '''crackers''' dangereux de tous les autres utilisateurs astucieux d'ordinateurs est un acte citoyen de grande valeur. C'est un grand pas vers la réconciliation sociale et la compréhension interculturelle.  
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Comment rencontrer des '''hackers'''&nbsp;? Contacter le Groupes d'Utilisateurs de Logiciels Libres (GUL) le plus proche de chez vous <ref>http://aful.org/gul/liste </ref>.
 
Comment rencontrer des '''hackers'''&nbsp;? Contacter le Groupes d'Utilisateurs de Logiciels Libres (GUL) le plus proche de chez vous <ref>http://aful.org/gul/liste </ref>.
  
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== RiP : Le manifeste du remixeur (encadré)==
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'''''RiP : Remix Manifesto''''' : ce long métrage documentaire fouille les complexités de la notion de propriété intellectuelle à l’ère du partage de fichiers pair-à-pair. Le cinéaste militant du web Brett Gaylor interroge des acteurs importants du débat, dont le roi des collages musicaux de Pittsburgh, Girl Talk. Création de « remixage » en soi, RiP fracasse les barrières entre utilisateurs et producteurs et conteste les limites de « l’utilisation équitable ». A visionner sur [http://www.onf.ca/film/rip_remix_manifesto www.onf.ca/film/RiP_remix_manifesto]
  
== RiP : Le manifeste du remixeur ==
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=== Les DJ du Libre ===
'''''RiP : Remix Manifesto''''' : ce long métrage documentaire fouille les complexités de la notion de propriété intellectuelle à l’ère du partage de fichiers pair-à-pair. Le cinéaste militant du web Brett Gaylor interroge des acteurs importants du débat, dont le roi des collages musicaux de Pittsburgh, Girl Talk. Création de « remixage » en soi, RiP fracasse les barrières entre utilisateurs et producteurs et conteste les limites de « l’utilisation équitable ». A visionner sur [http://www.onf.ca/film/rip_remix_manifesto www.onf.ca/film/RiP_remix_manifesto]
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Les DJ sont aujourd'hui les rois de la musique. Ils se trouvent être des remixeurs, c'est-à-dire qu'ils ne partent pas de rien mais saluent les créations des autres en les mettant en valeur, en apportant leur petite touche supplémentaire. C'est l'une des grandes transitions en cours : de la production de l'information à la gestion de son flux.
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La culture Libre participe du même état d'esprit : celui qui consiste à apporter sa modeste part pour contribuer à un édifice commun, après avoir d'abord prêté attention à l'immensité des contributions précédentes. Nombreux sont ceux, aujourd'hui, qui remixent les œuvres inconsciemment. Leurs créations, qui sont surtout des recyclages d'idées existantes, leurs paraissent pourtant « uniques ». Ces remixeurs craignent même de se faire « piquer » leur idée, alors qu'ils ont eux-mêmes « emprunté » à gauche et à droite pour la développer.
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Nous sommes tous plus que jamais des remixeurs dans tous les domaines : recherche scientifique, mode, musique, livres pédagogiques, philosophie.
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Aujourd'hui déjà, et demain encore plus, nos activités sociales et professionnelles sont basées sur la gestion de répertoires, de bases de données, davantage que sur leur création.
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Notre quotidien consiste à découvrir les œuvres de l'esprit, dans toutes les disciplines, à les étudier, à les connecter et à contribuer à les mettre à jour. Comme le ferait un disc-jockey.
  
 
== Notes et références==
 
== Notes et références==
 
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Version du 3 avril 2013 à 04:05

hackers, pirates, propriété intellectuelle, lois


Copier est-ce vraiment voler? C'est LA question qui fâche.

Comparer un copieur illégal de série télé à un braqueur de banque ou à un violeur semble pour le moins excessif. C'est pourtant ce qui se fait couramment.

De nouvelles lois ou projets de lois – DADvSI, HADOPI et LOPPSI 2 en France – fleurissent ça et là, qui entendent déclarer les copieurs hors-la-loi. Conçues, promues et votées par des personnes qui n'ont pas saisi l'impact profond et irréversible des propriétés sociotechniques du numérique, ces lois se révèlent contre-productives, liberticides et inapplicables à large échelle. La seule volonté de dénoncer et de condamner les pirates est source d'échec, de confusion et d'enlisement collectif.

Il est rare que la presse contribue de façon constructive au débat. Bousculée par l'arrivée du numérique, par la compression des personnels de rédaction, par les fusions qui concentrent le pouvoir dans les mains de quelques magnats et mise sous pression par l'industrie du divertissement, souvent copropriétaires ou gros annonceurs des médias importants, la presse peine à conserver son indépendance d'esprit. Il lui est difficile, dans de telles conditions, d'assurer une juste pesée des événements. La requalification du moindre copieur en « pirate », le détournement du sens du mot « hacker », le mélange indifférencié dans la même rubrique d'affaires de copyright, de pédophilie ou de vol de carte bancaire contribuent à jeter le discrédit sur la corporation journalistique. Mieux vaudrait aborder de front et en profondeur un enjeu aussi fondamental que l'évolution du système du droit d'auteur.

À la décharge de ceux qui stigmatisent les pirates, il faut reconnaître qu'une minorité de ces informaticiens astucieux cumule les intentions. Elle appartient alors, de fait, à plusieurs « familles », ce qui brouille parfois les cartes. Souvent bienveillants, souvent copieurs, ils sont parfois attirés par le petit coup de pub que leur vaudra une manipulation moins propre que les autres. De tels abus, on l'a dit, procèdent toutefois souvent d'une blessure initiale, dont l'origine n'est autre que... le manque de reconnaissance d'une bonne action : il suffit de lire le Manifeste du hacker pour mesurer l'éthique très saine qui anime cette population et le sentiment d'exclusion qu'elle semble vivre dès l'enfance.

Tenter de distinguer la minorité de crackers dangereux de tous les autres utilisateurs astucieux d'ordinateurs est un acte citoyen de grande valeur. C'est un grand pas vers la réconciliation sociale et la compréhension interculturelle.

Pour agir concrètement, il conviendra en premier lieu de bien digérer cet article, puis de vérifier ses sources sur le Web. Enfin, une fois convaincu, chacun pourra apporter sa petite contribution citoyenne :

  • Faire passer le message ;
  • Copier cet article ;
  • L'afficher au bureau ;
  • Le diffuser auprès de son journal local ;
  • écrire au courrier des lecteurs des publications s'autorisant des assimilations abusives ;
  • Rencontrer des hackers, discuter avec eux, s'en inspirer.

Comment rencontrer des hackers ? Contacter le Groupes d'Utilisateurs de Logiciels Libres (GUL) le plus proche de chez vous [1].

RiP : Le manifeste du remixeur (encadré)

RiP : Remix Manifesto : ce long métrage documentaire fouille les complexités de la notion de propriété intellectuelle à l’ère du partage de fichiers pair-à-pair. Le cinéaste militant du web Brett Gaylor interroge des acteurs importants du débat, dont le roi des collages musicaux de Pittsburgh, Girl Talk. Création de « remixage » en soi, RiP fracasse les barrières entre utilisateurs et producteurs et conteste les limites de « l’utilisation équitable ». A visionner sur www.onf.ca/film/RiP_remix_manifesto

Les DJ du Libre

Les DJ sont aujourd'hui les rois de la musique. Ils se trouvent être des remixeurs, c'est-à-dire qu'ils ne partent pas de rien mais saluent les créations des autres en les mettant en valeur, en apportant leur petite touche supplémentaire. C'est l'une des grandes transitions en cours : de la production de l'information à la gestion de son flux.

La culture Libre participe du même état d'esprit : celui qui consiste à apporter sa modeste part pour contribuer à un édifice commun, après avoir d'abord prêté attention à l'immensité des contributions précédentes. Nombreux sont ceux, aujourd'hui, qui remixent les œuvres inconsciemment. Leurs créations, qui sont surtout des recyclages d'idées existantes, leurs paraissent pourtant « uniques ». Ces remixeurs craignent même de se faire « piquer » leur idée, alors qu'ils ont eux-mêmes « emprunté » à gauche et à droite pour la développer.

Nous sommes tous plus que jamais des remixeurs dans tous les domaines : recherche scientifique, mode, musique, livres pédagogiques, philosophie. Aujourd'hui déjà, et demain encore plus, nos activités sociales et professionnelles sont basées sur la gestion de répertoires, de bases de données, davantage que sur leur création. Notre quotidien consiste à découvrir les œuvres de l'esprit, dans toutes les disciplines, à les étudier, à les connecter et à contribuer à les mettre à jour. Comme le ferait un disc-jockey.

Notes et références