Les médias sociaux éthiques : Différence entre versions
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Il existe d’ores et déjà de multiples indices qui laissent entrevoir une réponse collective et éthique aux réseaux sociaux à vocation commerciale. La centralisation d’informations dans une base de données unique, comme celles de Google, Facebook ou Twitter, est de toute façon incompatible avec la nature même du numérique, fondamentalement décentralisée. Il est plus que probable que nous allons progressivement assister à l'interconnexion de réseaux sociaux éthiques respectant la vie privée des utilisateurs et favorisant leur ''conscientisation.'' | Il existe d’ores et déjà de multiples indices qui laissent entrevoir une réponse collective et éthique aux réseaux sociaux à vocation commerciale. La centralisation d’informations dans une base de données unique, comme celles de Google, Facebook ou Twitter, est de toute façon incompatible avec la nature même du numérique, fondamentalement décentralisée. Il est plus que probable que nous allons progressivement assister à l'interconnexion de réseaux sociaux éthiques respectant la vie privée des utilisateurs et favorisant leur ''conscientisation.'' | ||
− | Les consom'acteurs sont de plus en plus nombreux à s'engager dans cette culture numérique active – même si le principe du 1 % développé par Will Hill reste encore (provisoirement ?) valide ; d’après Hill, une part infime des utilisateurs d’internet y contribue de façon proactive, 9 % participent occasionnellement de façon opportuniste et 90 % des internautes ne contribuent jamais.<ref> Article «[http://fr.wikipedia.org/wiki/Règle_du_1_%25 Règle du 1 %] », Wikipedia (consulté le 28.07.2014). | + | Les consom'acteurs sont de plus en plus nombreux à s'engager dans cette culture numérique active – même si le principe du 1 % développé par Will Hill reste encore (provisoirement ?) valide ; d’après Hill, une part infime des utilisateurs d’internet y contribue de façon proactive, 9 % participent occasionnellement de façon opportuniste et 90 % des internautes ne contribuent jamais.<ref> Article «[http://fr.wikipedia.org/wiki/Règle_du_1_%25 Règle du 1 %] », Wikipedia (consulté le 28.07.2014).</ref>. |
Version du 20 juillet 2016 à 12:58
Notions-clés:réseaux social, médias sociaux,communautés virtuelles(CoVI),interaction,base de données,consom'acteur,principe du 1%.
Profils-clés: Big Brother, bases de données, information, privatisation, éthique,citoyenneté numérique.Gates Bill,Qualman Eric,Google,Facebook,Zuckerberg Mark,Global Giant Graph(GGG),Berners-Lee Tim,Hill Will,Diaspora,Wiser,Ynternet.org
Les inquiétudes engendrées par l'arrivée des médias sociaux sont légitimes ; toute mutation s'accompagne de dérives qu'il est souhaitable de détecter aussi précocement que possible. La plus spectaculaire d'entre elles est certainement la revente par Facebook, Twitter et Google de nos données personnelles. Cette pratique les conduit à bafouer notre vie privée au profit de leurs actionnaires et de leurs partenaires commerciaux. Lorsqu'un service web est gratuit mais pas sous licence libre, le consommateur paie ce service en acceptant des termes d’usage, qui autorisent très souvent la commercialisation de ses données : centres d’intérêts, comportements, carnets d’adresses, tout est potentiellement revendable. C’est en quelque sorte la rançon de la gratuité...
Les plus spéculatifs des médias sociaux n'en demeurent pas moins des outils d'alerte et de consolidation de l'interaction — de la culture de la coopération synergique. À l'occasion des révolutions arabes de 2011, ils ont montré qu'ils pouvaient servir aussi les intérêts de la démocratie. En vérité, les opinions libres et initiatives multiples qui se déploient sur les médias participatifs n'existent que par la puissance de diffusion de ces réseaux.
Réseaux sociaux : pourquoi... ou plutôt comment ? [1]
En 2011, plus de 50 % de la population mondiale a moins de 30 ans. Et selon Eric Qualman, dont l’ouvrage Socialnomics est une des références intéressantes en la matière, 96 % des 25 à 30 ans ont déjà rejoint un média social. Aussi appelés réseaux sociaux, social networks ou communautés virtuelles, ils ont pour point commun d'être des plateformes web, offrant des services de relation sociales et de diffusion d'informations, à usage personnel ou professionnel.
Qu’ils enjambent les continents (Facebook, LinkedIn, Google+), irriguent une région spécifique (Viadeo, Xing, Rezonance) ou canalisent des centres d'intérêt thématiques (carrière, banques d'images, amitiés, liens familiaux, etc.), les médias sociaux reflètent, accueillent et amplifient la plupart des changements sociaux contemporains. Ils se sont notamment trouvés au cœur de la Révolution de jasmin, en Tunisie, qui a bouleversé le monde arabe en 2010-2011.
Les pionniers de la communication sociale, tels qu’Eric Qualman, assurent aujourd’hui que la question n'est pas de savoir si et pourquoi il est nécessaire de s'engager dans les médias sociaux, mais comment...
Au travail, en formation, en famille, quelles sont les clés à posséder pour en faire le meilleur usage ? Comme à chaque surgissement d’un nouveau média, nouvelles opportunités et nouveaux risques se côtoient.
La fin de la vie privée ?
Le premier grand leader du secteur sur la période de 2005 à 2015, Facebook, a notamment assis sa position sur des stratégies de modifications fréquentes de ses conditions d'usage, de façon à livrer de plus en plus sur la place publique toutes les informations relatives à ses utilisateurs.En 2005, sur Facebook, pour autoriser le libre accès à une information d’ordre privé, il fallait avoir recours à une procédure spécifique. En 2011, c’est le contraire : par défaut, tout est public. Si l’utilisateur souhaite conserver le caractère privé d'une partie de ses informations, il doit faire l'effort de changer les préférences de son compte. Mais, même s’il supprime son compte, ses données seront conservées ! Elles alimenteront en l’occurrence la banque de comportements humains désormais administrée, de façon très privée, elle, par les responsables des réseaux sociaux. On lira à ce propos l’ouvrage édifiant de Francis Pisani et Dominique Piotet, Comment le Web change le monde, dont voici un extrait adapté[2]:
« Cela va si loin qu'Eric Schmidt, le directeur de Google, a laissé entendre, après d'autres, que la vie privée, c'était terminé. Même son de cloche chez Facebook, leader incontesté du domaine des réseaux sociaux, avec plus de 500 millions d'utilisateurs en 2011. Chaque changement des règles de fonctionnement y réduit les libertés privées. Les conditions générales d'utilisation stipulent que les utilisateurs acceptent d'abandonner leurs droits de transférer leurs données sur un autre réseau social, de migrer. Ils sont captifs. Fin 2010, Mark Zuckerberg, fondateur de Facebook, a dû reconnaître l’existence des problèmes de protection de la vie privée, sans véritablement proposer de solution. Résultat : à la suite du Quit Facebook Day (campagne mondiale pour quitter Facebook) du 31 mai 2010, aux États-Unis, le nombre de nouveaux adhérents mensuels au réseau est brutalement passé de 8 millions (mai) à 320 000 (juin). ».
Dans un tel contexte, il est de plus en plus difficile de définir des limites entre vies privée et socioprofessionnelle. CV, photos, statuts, coordonnées, activités : doit-on se montrer prudent ou se livrer ouvertement ? La réponse peut sembler évidente mais, dans une recherche de vitalité tant économique que citoyenne, il faut la formuler autrement : à qui profite le réseau ? L'utilisation de ce réseau social sert-il les intérêts de la société ou ceux de ses éditeurs ?.
Il existe d’ores et déjà de multiples indices qui laissent entrevoir une réponse collective et éthique aux réseaux sociaux à vocation commerciale. La centralisation d’informations dans une base de données unique, comme celles de Google, Facebook ou Twitter, est de toute façon incompatible avec la nature même du numérique, fondamentalement décentralisée. Il est plus que probable que nous allons progressivement assister à l'interconnexion de réseaux sociaux éthiques respectant la vie privée des utilisateurs et favorisant leur conscientisation.
Les consom'acteurs sont de plus en plus nombreux à s'engager dans cette culture numérique active – même si le principe du 1 % développé par Will Hill reste encore (provisoirement ?) valide ; d’après Hill, une part infime des utilisateurs d’internet y contribue de façon proactive, 9 % participent occasionnellement de façon opportuniste et 90 % des internautes ne contribuent jamais.[3].
Réseaux sociaux : 1, Pornographie : 0
Dans son best-seller Socialnomics4, Erik Qualman dévoile des statistiques relatives à l'utilisation d'internet et des réseaux sociaux. Ainsi l'une d'elles révèle que sur le web, après des années de suprématie sans partage, la pornographie a été détrônée par... Facebook et ses frangins5.
Cette notion d'engagement individuel, de contribution et de mérite, de vigilance par la force de proposition, est la clé d’un meilleur usage des réseaux sociaux. Elle sert les intérêts de l'économie locale et la vitalité démocratique, au-delà des clivages politiques ou sociaux. Pour favoriser cet engagement, la recette n'a pas changé : formation à l'esprit critique, encouragement aux visions à long terme, au-delà des peurs, des incertitudes et des doutes. Les réseaux sociaux, comme la cuisine japonaise ou la conduite à gauche, ne peuvent s'apprendre que par l'action.
Quelques médias sociaux éthiques
Ils existent. Ils ne sont pas parfaits, car l'éthique se cultive, s’entretient, ne tombe pas du ciel. La fondation d'intérêt public Wikimedia, qui gère Wikipedia, est le modèle le plus souvent cité en la matière – à juste titre. Au-delà de la seule encyclopédie, Wikimedia rassemble des dizaines de projets de numérisation de la culture mondiale (avec notamment la coopération de musées et d’institutions éducatives), menés par des millions de contributeurs, dont seulement une centaine de milliers de pionniers réellement impliqués.
La fondation possède ses codes de conduites, ses forums, ses profils d'auteurs, ses traces de contributions, ses clubs et rencontres locales et globales en chair et en os qui tous concourent à construire un monde synergique. Il existe également de nombreux médias sociaux thématiques, qui constituent ce que l'on surnomme la longue traîne : la somme des petits réseaux sociaux de quelques milliers ou millions d'utilisateurs est égale, voire supérieure, à la somme des quelques leaders du domaine (en 2015, Facebook, Google+, Twitter et LinkedIn).
Ainsi, des projets comme Diaspora6 ou Wiser7 (États-Unis) ou certains petits réseaux francophones8, communautés virtuelles animées depuis 1998 par la fondation Ynternet.org, proposent des réseaux sociaux qui respectent la vie privée de leurs utilisateurs et évitent la concentration des pouvoirs ou la publicité intrusive. Ces réseaux se concentrent sur des services loyaux d'hébergement de sites personnels et de groupes, sans vices cachés.
On pourra consulter une première liste de ces petits réseaux9. À terme, ils pourraient s'interconnecter et former un réseau décentralisé susceptible, au-delà de son intérêt immédiat, de participer à l’émergence d’une nouvelle forme de confiance envers le monde du travail, la formation ou la famille. Cette interconnexion, sur le plan technique, est tout à fait réalisable. Le temps dira si elle est socialement nécessaire.
Enfants et médias sociaux, que faire ?
Faut-il interdire l’accès des médias sociaux aux enfants et adolescents ? Faut-il prendre le risque qu’ils s’y risquent en cachette ? Anne Collier donne ses conseils dans l’article Cyberbullying (chapitre 5). La privatisation de la société ?
La mise à nu obligée est lourde de dérives, on l’a compris. Mais cette menace en cache d’autres, probablement plus graves encore. Parmi elles, le passage du GGG en mains privées. GGG, ou Global Giant Graph10, tel que l’a décrit le découvreur du web lui-même, Tim Berners-Lee, représente une nouvelle étape dans le développement d’internet : l'attention n'y est plus focalisée sur l'information en réseau mais sur la vision globale des centres d'intérêt de l'humanité désormais offerte aux opérateurs indiscrets. La « carte » ainsi disponible est un instrument extraordinaire pour qui souhaite influencer l'opinion publique à tous les niveaux – commercial, bien sûr, mais aussi politique, éducatif, moral.
Les détenteurs de cette carte décisive sont ceux à qui l’internaute inconscient des risques collectifs encourus confie aveuglément ses données personnelles. Il accepte ainsi que ces dernières soient non seulement revendues mais également analysées dans le moindre détail par des observateurs très intéressés. Le Big Brother imaginé par George Orwell dans 1984 n’est plus seulement une créature littéraire...
On se rassurera en songeant que la situation, dans le monde numérique, ne reste jamais longtemps figée. Bill Gates lui-même le constatait, dans les années 90, quand il se trouvait confronté à l'émergence des logiciels libres et de la culture de citoyenneté numérique : le concurrent de demain est déjà à l'œuvre, dans son garage, et rien ne l'empêchera de détrôner ses prédécesseurs. Le nouveau concurrent possible, dans ce web qui se transforme en GGG, rassemblera tous les cybercitoyens, s’ils prennent conscience de leur responsabilité collective dans la préservation du savoir parmi les biens communs, au même titre que l'air et l'eau.- ↑ The Evolution of Privacy on Facebook. Changes in default profile settings over time, Matt McKeon,www.mattmckeon.com.
- ↑ Comment le Web change le monde, Francis Pisani et Dominique Piotet, Pearson, Paris (2011).
- ↑ Article «Règle du 1 % », Wikipedia (consulté le 28.07.2014).